Le concept, principal ressort de l’abstraction philosophique, est aujourd’hui, paradoxalement, inadéquate pour exprimer les arguments philosophiques qui font débat en Afrique noire. Trop aride, trop étroit, trop univoque, le concept réduit ce qui est vécu comme un « conflit de cultures » à un simple « conflit intellectuel ». Pour éviter cet appauvrissement, le concept exige le détour par la fiction romanesque. En témoignent deux romans : L’aventure ambiguë de Cheikh H. Kane et Entre les eaux de V.Y. Mudimbe. A travers eux, le romancier se fait philosophe, et le philosophe pleinement écrivain.
Autant dire que le discours philosophique exige un « dehors », une extériorité radicale capable de l’éclairer. « Philosopher en Afrique noire » relève autant du faire voir que du penser, tous deux inséparables l’un de l’autre.